Le tiroir aux interdits – L’édito de Christophe Bonnefoy
Dans la vie, il y a des priorités. Mais pas forcément celles qu’on croit. Nostalgiques du coup de règle sur les doigts – à l’école – ou de la fessée aux bambins – et encore, il faudrait distinguer la petite tape sur le postérieur, d’une tentative immodérée de faire souffrir – rangez vos souvenirs dans le tiroir aux interdits. Les députés veillent.
La fessée, donc, revient sur le devant de la scène pour un débat qui, on n’en doute pas, changera la face du monde. On comprend, bien sûr, l’objectif de cette prise en main de l’Assemblée. Il ne s’agit bien évidemment pas d’éduquer les enfants à la place de leurs parents, mais d’éviter les abus. Autrement dit, de refuser les violences et de dénoncer un système qui viendrait se complaire dans le châtiment. Normal. On ne peut en revanche qu’être circonspect, à la lecture des arguments développés par les tenants de l’interdiction : la fessée aurait des conséquences, qu’on imagine lourdes pour le coup, sur la santé physique et mentale des enfants. Déduisons-en donc que les centaines de milliers de petits devenus parents ou grand-parents souffrent aujourd’hui de lourdes séquelles. On pourrait presque en sourire.
Qu’on ne s’y méprenne pas : il n’est en toute logique pas question d’aller dans le sens des parents qui donnent du coup de poing. Un coup de poing, d’ailleurs, déjà puni par la loi. Reste pourtant la symbolique qui se dégage de ce débat. L’intrusion, à l’américaine presque, dans la vie des familles, sera à coup sûr l’un des arguments des opposants à cette interdiction. Ils y verront une ingérence certaine dans le quotidien des Français.
Place au débat suivant : faut-il toujours, désormais, menacer les enfants de les présenter au père Fouettard ? On peut se poser la question, à l’approche de Noël, si on se laisse aller à un peu d’ironie…