Les maux de la rue – L’édito de Christophe Bonnefoy
La politique est d’une certaine manière un art. Et lorsqu’on est président de la République, il consiste, entre autres, à savoir renvoyer les oppositions dans les cordes ; à œuvrer, pour ne pas dire manœuvrer, lorsque les députés – y compris de son propre camp – montrent les dents ; aussi, par petit écran interposé, à poser des mesures sur la table… mais sans possibilité de réaction immédiate des Français.
Les échanges avec les électeurs, en face-à-face, ne s’embarrassent au contraire d’aucun filtre. En l’occurrence, on ne peut pas accuser Emmanuel Macron de fuir les Français lorsqu’il est en déplacement. Mais les bains de foule, pour le coup, ne servent pas qu’à serrer les mains des sympathisants. Englué dans une impopularité record, ce sont des reproches, que le chef de l’Etat doit affronter le plus souvent. Les discussions – les interpellations devrait-on dire -, hier matin à Verdun, l’ont placé face à un constat : la colère gronde. Il le savait déjà, il a pu le vérifier encore. Et ce n’est pas tant à des questions précises qu’il avait à répondre, mais à une grogne diffuse, un sentiment général qui se résumera peut-être le 17 novembre par un mot : « Assez !». C’est vrai pour les retraités. Ça l’est aussi pour les automobilistes – qui sont d’ailleurs parfois aussi retraités ! -. On n’oubliera pas, non plus, les étudiants, les chômeurs, les chefs d’entreprise… Emmanuel Macron est visiblement conscient du malaise. Mais alors qu’il demande du temps pour poser les bases d’une société nouvelle, les Français, eux, veulent tout simplement pouvoir vivre le moins mal possible au quotidien. Et en tout état de cause ne pas avoir le sentiment qu’on les taxe un peu plus chaque jour. Même si c’est partiellement faux.