Affaire d’équilibre – L’édito de Christophe Bonnefoy
Une visite présidentielle dans les rues habituellement si paisibles de Colombey-les-Deux-Eglises est par définition un événement. Parce qu’elle est un hommage forcément appuyé au général de Gaulle, bien sûr. Aussi parce qu’elle s’accompagne parfois de non-dits beaucoup plus révélateurs que ce qui est exprimé.
La venue d’Emmanuel Macron, hier, n’intervient pas n’importe quand. La crise au sommet de l’Etat – que réfute le président de la République – était évidemment dans toutes les têtes. L’affaire Benalla est passée par là. Le fameux selfie à Saint-Martin également. Et, surtout, actualité encore plus récente oblige, la démission du ministre de l’Intérieur. Pour le nom de son remplaçant, on attendra. Ceux qui espéraient que la quiétude de la Boisserie délierait les langues et favoriserait les annonces prendront leur mal (d’info) en patience.
Le 60e anniversaire de la Ve République, objet de l’étape présidentielle, aura, lui, été quelque part détourné de son objectif premier. D’une célébration, on sera passé à une forme de contestation. Les oppositions reprochent précisément à Emmanuel Macron, et donc indirectement au système pensé par Charles de Gaulle, de concentrer plus de pouvoirs que de raison. Le Président, à l’inverse, loue une Constitution «qui permet d’avancer» et d’«éviter la tyrannie de l’immédiateté». Le débat est ouvert.
Pour le coup, il n’est peut-être pas tant sur les équilibres que préserve – ou pas – la Ve République. Mais plutôt sur l’utilisation qui est faite de la Constitution. Pas tellement sur ce qui est inscrit dans le marbre, mais comment les principes sont interprétés et les fondements utilisés. Parfaitement respectés, diront les uns. Détournés, rétorqueront les autres.