Coups de poker – L’édito de Patrice Chabanet
Emmanuel Macron avait à gérer deux situations délicates. Dans la première, il subissait l’événement, avec la démission spectaculaire de Nicolas Hulot. Dans la seconde, il s’était pris lui-même les pieds dans le tapis en évoquant ses doutes quant à la faisabilité du prélèvement à la source. Hier, il a tenté de se rétablir avec ce qui ressemble à deux coups de poker. Toute la question est de savoir si les cartes qu’il a jouées lui permettront de reprendre la main et de faire reculer le scepticisme des Français qui le châtient sévèrement dans les sondages.
L’arrivée de François de Rugy à la Transition écologique apportera, c’est évident, plus de savoir-faire politique et de pragmatisme dans la gestion de dossiers épineux qui appellent le sens du compromis avec les ministères de l' »ancien monde ». Le président de l’Assemblée nationale ne fonctionne pas à l’affect comme Nicolas Hulot qui n’a pu dissimuler son émotion lors de la passation des pouvoirs. Mais il souffre d’un gros déficit de popularité et de charisme. Sa crédibilité et sa capacité à faire oublier son prédécesseur ne seront possibles qu’à une seule condition : réussir là où l’ancien animateur d’Ushuaïa a échoué. Faute de quoi, il sombrera comme tous les ministres de l’Ecologie de la Ve République. Et son échec se répercutera sur le locataire de l’Elysée.
Pour le prélèvement à la source, on ne saura qu’à l’usage, c’est-à-dire début 2019, si c’est le bon choix qui a été fait. Les tergiversations présidentielles font déjà désordre et ne correspondent pas au volontarisme affiché du vainqueur de 2017. Il faut déjà savoir que le moindre bug sera exploité par les oppositions et sur les réseaux sociaux. Cela dit, les Français qui paient l’impôt sont largement favorables à la mesure qui a été prise hier soir. Il est honnête de le rappeler.
En attendant, l’exécutif se dit prêt, comme l’a souligné hier Edouard Philippe, à relancer de plus belle le train des réformes. Passer à autre chose. Une manière de faire oublier une rentrée ratée. Avec le risque, aussi, de mécontenter ceux qui pensent que ça va trop vite et ceux qui estiment le contraire. Où est la juste vitesse ? That is the question.