Ça déraille – L’édito de Patrice Chabanet
Trop, c’est trop. La ministre des Transports, Elisabeth Borne, a demandé aux deux patrons de la SNCF, Guillaume Pepy et Patrick Jeantet, de venir s’expliquer sur la cascade d’incidents qui ont touché le trafic ferroviaire. Une convocation qui a valeur de coup de gueule. Rendez-vous au ministère le 8 janvier à 12 heures. Visiblement, la rencontre n’aura pas le charme discret des vœux de Nouvel An. Il faut dire qu’on ne peut plus parler de malchance, mais de lourdes défaillances. Entre les bugs informatiques et les problèmes d’alimentation électrique, l’exaspération est manifeste chez les voyageurs, notamment dans les gares parisiennes. Les explications a posteriori ne remplacent pas les mesures qui auraient dû être prises a priori. Visiblement, la stratégie d’investissement n’a pas été la meilleure. Elle n’est d’ailleurs pas imputable aux seuls dirigeants d’aujourd’hui. Il y a quelques décennies, le paquet a été mis sur le TGV, car ce dernier véhiculait une belle image du savoir-faire français en matière de matériel ferroviaire. Mais pendant que ce bijou de technologie était exhibé, on a mis sur une voie de garage tout le reste, c’est-à-dire le réseau classique et les TER. Du coup, l’entreprise longtemps citée pour sa ponctualité s’est mise à dérailler, en cumulant les retards.
La SNCF et son autorité de tutelle, l’Etat, ont pris conscience de l’impact du sous-investissement. C’est le directeur général délégué de SNCF Réseau qui le reconnaît lui-même. 46 milliards ont été prévus sur dix ans pour améliorer la situation. Sauf que les travaux provoquent à leur tour des perturbations dans le trafic. Il est difficile d’assurer la continuité du service tout en remettant les infrastructures à niveau. On peut donc s’attendre à de nouveaux incidents. C’est le prix à payer pour un coupable manque d’anticipation. En attendant, la SNCF doit gérer l’urgence : comment réduire l’impact des pannes. Elle n’a plus le prétexte de l’inexpérience dans ce domaine…