Faire avec – L’édito de Christophe Bonnefoy
Si Bachar Al-Assad était une blanche colombe, ça se saurait. Et personne n’irait par conséquent lui chercher des poux sous les plumes. Pour le coup, ce n’est pas d’un gentil nom d’oiseau qu’on l’affuble, mais d’un qualificatif beaucoup moins flatteur et ô combien plus révélateur de sa personnalité et de la cruauté de ses actes. Le boucher de Damas n’a en effet rien à envier aux pires dictateurs de la planète, passés ou présents. Morts ou encore vivants. Mais il est là, et bien là. Et il faut faire avec… pour le moment.
Malheureusement, il reste en effet l’interlocuteur incontournable, bien qu’infréquentable, des grandes puissances présentes actuellement dans la région pour combattre Daech.
Beaucoup l’ont bien compris, dont Emmanuel Macron, qui tout en considérant indispensable de parler avec le chef syrien, le verrait bien traduit devant une Cour internationale. Le chef de l’Etat français n’a pas dit autre chose : il faudra bien, un jour, qu’Al-Assad réponde de ses crimes. Pour l’instant, les négociations entre le pouvoir en place et l’opposition sont une nécessité, faute de quoi le pays plongerait un peu plus dans le chaos, si cela est encore possible. Et après ? Un pays comme la France se refuse, en façade, à peser sur la situation intérieure de la Syrie. Dans le même temps et de facto, donner son avis sur le dictateur et intervenir contre Daech sont déjà une sorte d’ingérence – indirecte, mais nécessaire -. Le problème est beaucoup plus compliqué qu’il n’y paraît. Il intègre à la fois l’obligation de ne pas laisser massacrer impunément et indéfiniment, tout un peuple ; mais aussi de parler avec tous ceux qui peuvent être un tant soit peu influents pour rayer l’organisation Etat islamique de la carte. La diplomatie, plus ou moins ferme, n’a jamais été aussi nécessaire. Et fragile, aussi.