En campagne – L’édito de Patrice Chabanet
En campagne – L’édito de Patrice Chabanet
lls étaient combien ? Eternelle question après toute manifestation politique ou syndicale. A l’heure des drones, il est toujours impossible d’avoir des chiffrages incontestables. 150 000, selon les proches de Jean-Luc Mélenchon, 30 000 selon la police. L’écart qui sépare une déferlante d’une houle, un grand succès d’un résultat moyen. Dans le cas d’espèce, ce n’est pas le public qui importe, mais celui qui fait le spectacle. En fait de manifestation, on a eu droit à un meeting focalisé sur le patron de la France insoumise. D’une certaine manière, Jean-Luc Mélenchon est toujours dans la campagne présidentielle. Il a fait hier, comme à son habitude, un procès en légitimité à Emmanuel Macron. Dans sa harangue, il a justifié le pouvoir de la rue, avec des raccourcis qui laissent pantois : la rue a fait tomber les nazis, elle peut donc faire tomber Macron. Dans une France, en tension permanente, utiliser de tels arguments, c’est s’engager sur une pente extrêmement glissante. Il y a d’autres moyens, moins médiocres, pour s’opposer aux ordonnances.
Jean-Luc Mélenchon use et abuse de sa performance de tribun. En délégitimant régulièrement le nouveau pouvoir, régulièrement élu, il fait remonter à la surface les vieux concepts communistes : la supériorité de la rue sur les institutions représentatives, et la victoire inéluctable de son organisation érigée en aile marchante du peuple. On passe sans le dire de 2017 à 1917. La réalité est moins romantique. Tous les sondages montrent que Mélenchon est rejeté par deux Français sur trois, même si son emprise sur la gauche se fait de plus en plus forte, faute de challengers crédibles.
Cela dit, l’exécutif a tout à craindre de discours, tant à l’extrême droite qu’à l’extrême gauche, qui font flèche de tout bois pour déstabiliser le pays. Les deux s’arrogent le droit de parler au nom du peuple. Il faudrait seulement leur rappeler qu’elles n’en représentent qu’une partie. On a trop connu ces régimes qui prétendaient représenter tout le peuple.