Les vautours – L’édito de Patrice Chabanet
Les vautours – L’édito de Patrice Chabanet
Les faits ne sont pas nouveaux, mais ils restent révoltants. Les pillages qui sont commis dans le sillage d’Irma ajoutent au malheur des habitants durement frappés par l’ouragan. Il n’aura fallu que quelques heures avant que leurs auteurs ne se jettent sur ce qui restait encore debout après l’épouvante. Passe encore pour ceux qui ont mis la main sur des bouteilles d’eau, des packs de lait ou de la farine. Nécessité peut faire loi. Mais que dire de ces vautours qui s’emparent d’écrans plats ou d’électroménager ou qui chargent des chariots entiers de tout ce qui peut représenter une certaine valeur ? Les autorités, c’est vrai, ont une priorité : rétablir l’eau, l’électricité et le téléphone, organiser la distribution des vivres, rouvrir les routes encombrées de troncs d’arbres et d’épaves de voitures. Mais dans la foulée, elles devront rétablir l’ordre car, on le sent dans les reportages, la population risque de se faire justice elle-même. Le sentiment de la double peine – l’ouragan et les pillages – peut être mauvais conseiller chez des habitants encore en pleine sidération. Et ce n’est pas la perspective d’un deuxième ouragan, lui aussi très violent, qui a des chances d’atténuer les exaspérations et les sourdes colères. On peut comprendre que gérer l’après-catastrophe n’est pas facile pour les autorités, surtout lorsque l’ampleur de l’événement s’inscrit dans l’ordre de l’inédit. Mais les habitants sur le terrain, si le mot veut encore dire quelque chose, se raccrochent à une seule branche pour sortir du cauchemar, celle de l’Etat reconstructeur et protecteur. Ils en exigent une action rapide, pour ne pas dire immédiate.
L’apparition de bandes de pillards nous confirme une nouvelle fois de sérieuses déviances dans l’espèce humaine. Pour autant, elle ne saurait nous faire oublier tous ceux qui sont partis pour aider et panser les plaies, le dévouement chevillé au corps. Ils viennent de métropole, mais aussi de Guadeloupe et de Martinique. Ils sont l’honneur d’une société que l’on dit souvent prisonnière de ses égoïsmes.