Quand la réalité détruit les trop beaux discours
La semaine dernière, Stéphane Travert, ministre de l’Agriculture, a amputé les aides consacrées à l’agriculture biologique. Eric Gruot, président du GAB 52, s’en étonne même plus sachant que la situation dure depuis plusieurs années. Il dénonce le fossé entre le discours des politiques et la réalité.
La décision ministérielle, la semaine dernière, de rogner sur les aides à l’agriculture biologique n’a même pas surpris Eric Gruot, président du Groupement des agrobiologistes de Haute-Marne et lui-même agriculteur “bio” à Villiers-sur-Suize. Il témoigne : « dans ce secteur, il y a toujours eu des problèmes d’accompagnements avec des effets d’annonce qui se multiplie sans que l’on ne voie la moindre concrétisation. Cela va même en s’aggravant ».
Eric Gruot a conscience des problèmes budgétaires européens, français et régionaux mais le désintérêt des politiques pour l’agriculture biologique semble s’amplifier depuis 3 ans. En 2015, les pouvoirs publics annonçaient sa volonté de relancer le secteur avec comme objectif 20 % de terres converties et une aide de 300 €/ha pour la conversion.
En Haute-Marne, comme ailleurs, cette annonce a créé un réel engouement d’autant plus que les 3 ans que dure la conversion sont toujours compliqués financièrement. Eric Gruot parle d’une belle opportunité. Problème : dès 2016, face à cet engouement, les aides ont été plafonnées. Face aux intentions de conversion, la Région aurait dû mettre 30 millions d’euros sur la table et non pas 20 comme prévu. Elle a alors décidé de verser, au maximum, 30 000 € par exploitation. Eric Gruot explique que cette décision a été d’autant plus dommageable à la Haute-Marne que le département, en zone intermédiaire, possède des grandes exploitations. Les exploitants compensent le manque de productivité des terres pas de plus grandes surfaces. Le réseau “bio” s’était alors mobilisé et le plafond était remonté à 45 000 €. Pire : en 2017, le plafonnement est tombé à 10 000 €.
Pour l’aide au maintien, la situation n’est pas plus favorable puisque les aides PAC de 2015 ne sont pas encore soldées et celles de 2016, sous une autre forme, ne sont pas versées. La raison invoquée par la DDT consterne Eric Gruot. Il lui est répété que l’Administration n’a pas d’information sur les droits de chacun et qu’elle préfère ne pas verser les aides plutôt que de les donner puis de les reprendre.
Du coup, pour l’instant, les aides “bio” se montent à zéro euro avec des problèmes de trésorerie évidents dans les exploitations. Eric Gruot en profite d’ailleurs pour signaler que les aides qui ont été prélevées à l’agriculture conventionnelle n’ont jamais été perçues par les “bio”. « Certains cherchent à diviser les agriculteurs. Or, rien n’est redistribué ».
Eric Gruot est d’autant plus désolé de cette situation qu’il existe une réelle demande de la part de la société et que des opportunités de changement de système s’offraient aux agriculteurs. « On entrevoyait même une dynamique locale avec la construction de filières, de la transformation à la vente. Ma crainte est que ces coups donnés à l’agriculture biologique stoppent tout en laissant la place aux produits importés. Nous passons à côté d’une opportunité ». L’homme est surpris de ne pas entendre Nicolas Hulot, le ministre de la Transition écologique sachant que la décision de la semaine dernière était « hélas, une suite logique, dans les renoncements successifs ».
Il conclut : « la moindre des choses serait de connaître les aides réelles afin de se convertir au bio en connaissance de cause. Ce manque d’honnêteté met les agriculteurs dans la galère et va faire reculer l’élan actuel pour le bio ».
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