L’humaniste – L’édito de Christophe Bonnefoy
L’humanisme ne se décrète pas. Et il ne s’affiche pas ostensiblement. Il se nourrit, tout simplement, d’actes tout en discrétion, de petits gestes de tous les jours. Mais parfois, il vit aussi à travers des symboles, forts, qui font avancer la société. Qui font changer le monde.
Simone Veil s’est éteinte hier à quelques jours de ses 90 ans. Elle était de ces êtres, femme politique bien sûr, mais surtout, humains au sens le plus noble. De ces femmes que les douleurs ont renforcées dans leurs convictions, hors des parti-pris, des partis, presque, même si elle fut profondément ancrée dans ce centrisme historique des années 80. Hors des petits calculs. Loin des ambitions carriéristes. Uniquement la politique et ses valeurs les plus justes : pour l’autre, pour ses concitoyens. Elle qui avait connu la terrible épreuve de la déportation à l’aube de ses 16 ans, aura consacré sa vie entière à mettre ses blessures de côté pour user d’une sacrée force de caractère au service de son prochain.
Il restera d’elle, évidemment, et c’est encore plus saisissant à l’heure où l’Assemblée semble chercher ses repères, l’image d’une femme qui, contre vents et marées, s’était adressée aux députés un jour de 1974 pour plaider en faveur de l’interruption volontaire de grossesse. Un combat perdu d’avance ? Bien au contraire. Ce jour restera historique pour des millions de femmes. L’instantané est à jamais inscrit dans l’Histoire, non seulement de l’Hémicycle, mais dans la nôtre, aussi. L’Académicienne – élue en 2008 – appartenait à ce cercle très fermé des Immortels. Sa vie, ses combats mais aussi le témoignage poignant qu’elle aura laissé sur la Shoah auront également donné à son action cette couleur d’éternité.