La revanche des sondeurs – Patrice Chabanet
Dernière la bataille politique, s’est jouée aussi la crédibilité des instituts de sondage. Après l’élection de Donald Trump et la victoire du Brexit qui avaient déjoué leurs pronostics, ils risquaient gros. Il faut savoir, en effet, que les élections constituent la vitrine flamboyante de leurs activités. L’essentiel de leur chiffre d’affaires est constitué par des en-quêtes de marketing. En d’autres termes, toute déconvenue dans le champ politique ne peut que les desservir. Or force est de constater que pour ce premier tour de la présidentielle, ils ont vu juste.
Ils ont su détecter les deux finalistes. Et, dans les tout derniers jours, ils ont repéré la légère avance d’Emmanuel Macron. Cela dit, la peur de l’échec les a tétanisés pendant toute la campagne. Eux aussi, comme les politiques d’ail-leurs, savent utiliser les éléments de langage. Rituellement, les médias et les électeurs ont été avertis que chaque nouveau sondage «n’était qu’une photographie de l’opinion publique à un moment donné» et qu’«en aucun cas, il ne s’agis-sait d’une prévision». Mais dès l’annonce des résultats, il n’était plus question de photographie, mais de «tendances fiables», confirmées par les urnes. Vérité avant l’élection, vérité après…
La satisfaction évidente des instituts sondages s’explique aussi, en creux, par l’échec de leurs nouveaux concurrents, les sociétés de Big Data.
Ces dernières, comme leur nom l’indique, brassent des masses énormes de données qui nourrissent les sacro-saints algorithmes. Elles avaient prévu le maintien de François Fillon au second tour.
On connaît la suite. C’est un coup d’arrêt pour des méthodes qui se veulent hypersophistiquées et dont la rigueur scien-tifique n’apparaît pas évidente. Les principaux clients – à sa-voir les entreprises – des instituts de sondage ont
été rassurés. La rigueur est plutôt de leur côté.
Leur succès a dissipé le doute.