Affaiblissement syndical – Patrice Chabanet
Les défilés du 1er mai n’ont pas attiré la grande foule. Le contexte politique aurait même eu un effet anesthésiant. La comparaison avec 2002 a mis en lumière une démobilisation certaine face à une donne électorale voisine. Pourtant, il serait trop facile de faire un cas de l’affaiblissement des syn-dicats français. Il en est de ces derniers comme des autres corps intermédiaires. On le voit avec les partis traditionnels qui se battent désormais pour leur survie.
La partie visible des syndicats est devenue sans doute plus modeste, mais dans le quotidien ils demeurent un rouage essentiel dans la négociation collective. En 2015, plus de 36 000 accords d’entreprises ont été signés. Il y a donc une pratique du dialogue qui échappe aux projecteurs de l’actualité, et qui dément la réputation d’un blocage permanent. Il est tout aussi vrai que le taux de syndicalisation en France est l’un des plus bas d’Europe, moins de 10 %. Il dépasse les 70 % dans les pays nordiques. Une autre culture et d’autres pratiques du dialogue social.
Avec la nouvelle donne politique qui se profile, quel que soit le vainqueur, le syndicalisme français aura sa part à prendre dans les stratégies économiques qui seront mises en place. Faute de quoi, ce seront des coordinations et des groupes incontrôlés qui prendront le relais. On en devine aisément le danger. Le progrès social et économique implique des partenaires forts, qu’il s’agisse des organisations patronales et des syndicats. L’une des raisons de la réussite allemande se trouve dans la solidité de ces deux piliers. Contrairement à une idée reçue, les syndicats allemands ne sont pas des bénis oui-oui. Les grèves, outre-Rhin, sont moins fréquentes que chez nous, mais beaucoup plus dures. Il n’empêche, quand un accord est signé, il n’en a que plus de poids. On pourra objecter que les divisions syndicales expliquent la situation française. C’est vrai. Elles sont à l’image de la société française.
Mais c’est une autre histoire.