Le mur du déni – L’édito de Patrice Chabanet

Il persiste et signe : l’homme suspecté d’avoir enlevé la petite
Maëlys continue de nier. A chaque nouvel élément à charge,
l’ancien militaire reste muré dans ses dénégations. Les images
vidéo qui montrent dans son véhicule une silhouette blanche sur
le siège de passager ? Il nie que ce soit sa voiture. Le nettoyage
à fond, avec des produits surpuissants, de l’intérieur de cette
auto ? C’était en vue d’une revente. Depuis trois mois, Nordahl
Lelandais a une réponse à toutes les enquêtes qui l’accablent.
La Justice, elle, a décidé de passer à la vitesse supérieure. Déjà mis
en examen pour enlèvement, le suspect a accroché une nouvelle
incrimination, «meurtre précédé d’un autre crime». En droit, tout
mis en examen est présumé innocent, mais en l’occurrence la
barque est de plus en plus chargée. Elle permet de contrebalancer
deux handicaps majeurs dans l’élucidation de cette affaire : le corps
de la fillette n’a jamais été retrouvé et le suspect n’a jamais avoué.
Tout porte à croire que Nordahl n’avouera jamais, même si de
nouvelles preuves lui sont présentées sous le nez. Mais face à un
jury populaire et à l’intime conviction de ce dernier, le mur du déni
risque d’être sérieusement ébranlé. C’est l’honneur de la Justice de
permettre à la vérité de se frayer un chemin dans un débat contradictoire.
Dans cette affaire, c’est vrai, l’émotion légitime de l’opinion
publique se heurte à la longueur de l’enquête. On pense aussi au
meurtre d’Alexia Daval, où les investigations paraissent patiner. La
criminalité, hélas, offre un vaste spectre de comportements et de
situations. Il y a des affaires élucidées en quelques heures, d’autres
qui s’évanouissent dans les sables de preuves trop ténues, de
corps jamais retrouvés et de criminels disparus dans la nature. Les
parents de la petite Maëlys, eux, n’en sont pas encore là. Ils veulent
seulement savoir, dans un premier temps, ce qu’est devenue leur
fillette.