Défaite annoncée – L’édito de Patrice Chabanet

Si ce n’est pas une humiliation, cela y ressemble beaucoup. En signant un cessez-le-feu avec l’Azerbaïdjan, l’Arménie cède à ce dernier une partie du Haut-Karabakh. A dire vrai, elle n’avait pas vraiment le choix. Elle ne faisait pas le poids sur le plan militaire. Le budget de la Défense de son ennemi azerbaïdjanais est supérieur au budget total de l’Arménie. Surtout, la Russie de Poutine a ordonné la fin de la partie. Pour que les choses soient claires, Moscou a envoyé tout de suite 2 000 hommes pour faire respecter le cessez-le-feu.

L’autre grand gagnant de ce conflit est la Turquie. C’est elle qui a aidé l’Azebaïdjan au nom des affinités religieuses. L’amertume des Arméniens n’en est que plus grande. Elle s’accompagne de vieux souvenirs qui remontent à la surface, notamment celui du génocide. De surcroît, les prétentions ottomanes d’Erdogan font craindre le pire à terme pour l’avenir non seulement du Haut-Karabakh, mais de l’Arménie elle-même, perçue comme un verrou qui bloque la continuité territoriale entre Turquie et Azerbaïdjan. C’est d’ailleurs cette perspective qui a conduit Moscou à imposer la fin des combats. Cette région du monde est volatile. Laisser un conflit local dégénérer pourrait devenir incontrôlable.

La confrontation Chine-USA est souvent présentée comme un danger majeur pour la paix mondiale, comme l’a été en son temps le face-à-face URSS-Etats-Unis. Il ne faudrait pas oublier pour autant tous ces contentieux frontaliers congelés pendant la Guerre froide et ravivés par la chute du communisme. Pour le moment, ils restent sous contrôle. Un jour ou l’autre – mais le plus tard possible – le jeu des alliances et des provocations pourrait mettre en route un engrenage fatal.