L’article indéfini – L’édito de Patrice Chabanet
L’histoire ne retiendra pas la loi « sécurité globale », un texte parmi d’autres. En revanche, elle s’attardera sur la polémique à propos de l’une de ses dispositions, l’article 24. Mal ficelé, il doublonne des lois existantes. Sa réécriture annoncée ne fera qu’entretenir la bataille politique. En fait, ce juridisme de circonstance est un cache-misère pour masquer l’incapacité de l’Etat, aujourd’hui, à maîtriser la montée de la violence dans notre pays. Il y a télescopage entre les intentions affichées et la réalité sur le terrain. L’actualité en témoigne : le tabassage d’un producteur par des policiers, et le tabassage d’un policier pendant la manifestation de samedi à la Bastille. L’un n’excuse pas l’autre. Même si certains veulent minimiser les attaques subies par la police en prétendant que le policier sévèrement agressé avait été « molesté ».
La solution ne viendra pas du vote de la nouvelle loi et de la réécriture de l’un de ses articles. S’agissant de la police, des réformes sont indispensables au niveau du recrutement, de la formation et, surtout, de la chaîne de commandement qu’on voit peu sur le terrain et qui semble dépassée quand la situation dégénère. Pour ce qui est des manifestations, les organisateurs se défaussent facilement dès que les black blocks entrent en scène. Le droit de manifester n’est pas celui de renvoyer la responsabilité des saccages et des brutalités contre les forces de l’ordre sur l’Etat. Ce n’est pas à ce dernier d’assurer l’ordre au sein des manifestations. Le ferait-il qu’il serait accusé de dérive liberticide. On peut d’ailleurs se demander pourquoi, depuis une vingtaine d’années, rien n’a été fait pour démanteler ces bandes armées : très peu d’arrestations, de rares condamnations. La répétition de ces scènes de guérilla ne peut que susciter le scepticisme et la méfiance des Français. Elle fissure chaque fois un peu plus l’architecture de notre démocratie.