Valéry Giscard d’Estaing, le Président prisonnier des apparences
Aucun autre président n’aura souffert d’une telle dichotomie entre son apparence d’aristocrate venu de la grande bourgeoisie et la modernité de sa pensée et de ses actes. Et comme il est plus aisé de juger sur les apparences, il a été victime de son image. Les Français sont passés à côté de Valéry Giscard d’Estaing, disparu à 94 ans.
La légalisation du droit à l’avortement, la majorité à 18 ans, le divorce par consentement mutuel, la souveraineté énergétique grâce au développement du nucléaire, une certaine idée de l’Europe avec la réconciliation sincère avec l’Allemagne et avec qui il parlait d’égal à égal, les prémices de la monnaie unique, l’économie adaptée aux contraintes extérieures sont autant de symboles de son ouverture d’esprit et de sa volonté réformatrice.
Son obsession était de moderniser la France. Il y est parvenu et les Français ne lui ont jamais dit. Pourtant, il restera de “ses” années le sentiment que tout était possible, que chacun pouvait s’élever dans la société et non pas rapetisser comme aujourd’hui.
En agriculture, les paysans vivaient de leur métier sans aide publique. Travailler durement était récompensé et, à l’époque, parce que le deuxième choc pétrolier et l’inflation n’avaient pas encore cassé la machine économique, les agriculteurs construisaient et payaient leur maison comptant. Tout un symbole. La souveraineté alimentaire était une évidence jamais remise en cause.
D’ailleurs, comme quoi les apparences sont trompeuses, Jacques Chirac, longtemps considéré comme l’ami des agriculteurs, est décédé à Paris entouré de Parisiens. Valéry Giscard d’Estaing sera inhumé sur ses terres du Loir-et-Cher, entouré de ses 200 ha de céréales dont il prenait un soin particulier.
Valéry Giscard d’Estaing symbolise, à lui seul, les années 70 chargées d’insouciance et de tous les possibles. Une certaine liberté d’action et de devenir qui, 40 ans après, a disparu. Liberté d’entreprendre, liberté de penser, liberté de s’exprimer, liberté sexuelle sans contrainte et sans prise de tête.
Valéry Giscard d’Estaing avait, en plus, l’obsession de ne pas encombrer les entrepreneurs et les particuliers de paperasses. Il ne supportait pas les lourdeurs administratives. Lui qui est décédé des suites de la Covid-19 aurait une colère froide dont il était coutumier en voyant que la France va mettre cinq mois à enclencher la vaccination contre le virus alors qu’il aura fallu une semaine au Royaume-Uni. Il détestait voir la France tourner au ralenti de peur qu’elle s’arrête et qu’elle perde de sa grandeur.
Frédéric Thévenin – f.thevenin@jhm.fr
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