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François Cornut-Gentille : « la machine démocratique tourne à vide »

Le député de Haute-Marne, au Palais Bourbon depuis 1993, sort un nouvel ouvrage fin janvier dans lequel il prolonge ses réflexions et avance des idées pour redonner corps à la démocratie française. Tour d’horizon avec lui des sujets d’actualité.

Le J.H.M : Nous traversons une crise sanitaire mais aussi économique et sociale sans précédent. Quel regard portez-vous sur la gestion de la crise par l’exécutif depuis mars dernier ?

François Cornut-Gentille : « Je suis, à la différence de pas mal de monde, assez prudent. On voit bien que la maladie, on la connaît mal y compris les médecins qui disent tout et son contraire. Les politiques, qui ne sont pas des scientifiques, sont encore plus en difficulté. Je suis donc assez prudent dans mes réserves vis-à-vis du gouvernement. Justement, le fait que nous ne soyons pas médecins aurait dû amener le gouvernement à un peu plus de prudence. Il aurait dû mieux informer les partis politiques et pas au dernier moment. Ils ont été convoqués une fois les décisions prises alors forcément on est entré dans un jeu politicien. Si on veut dépasser les clivages, cela suppose que l’on donne l’information assez tôt à tout le monde. Depuis huit mois, le gouvernement ne le fait pas (…) S’il y a une erreur du gouvernement, plus que sur le fond, c’est dans la manière d’associer ou de ne pas associer les différentes sensibilités politiques du pays. Le Président, c’est son tempérament, parle trop. Comme il est assez discuté, y compris ses avis sur la pandémie deviennent un problème. Je pense que beaucoup de choses auraient dû être gérées par le ministre de la santé et éventuellement par le premier ministre. (…) Est-ce qu’on aurait fait mieux ? Je n’en sais rien. En revanche, je pense qu’on aurait pu créer un climat plus posé. L’approche choisie a plus contribué à faire monter les tensions qu’à les faire baisser. Sur le fond, mais je le dis avec une grande prudence, même si on ne connaît pas bien la maladie, on connaît les publics fragiles. Il me semble qu’on aurait pu avoir une stratégie, plutôt que d’arrêter tout le pays, qui protégeait les personnes les plus fragiles.

 «Nous traversons une crise politique grave»

Le J.H.M : Fin janvier, paraît votre nouvel ouvrage : après « Gouvernez ! » paru il y a cinq ans, quels seront les messages ?

F. C-G. : Je suis frappé par certaines choses. Avant, les Français n’étaient pas d’accord, entre gauche et droite. Mais, d’une certaine façon, la gauche comprenait ce que faisait la droite même si elle désapprouvait et inversement. Aujourd’hui, chaque décision peut être remise en cause en permanence. Plus personne ne comprend ce qui se passe. Il n’y a plus d’horizon vers lequel on peut orienter les Français. Nous traversons une crise politique très grave. Les gouvernements essayent de s’en sortir en faisant de la communication et en prenant des initiatives mais elles donnent le tournis.

Le J.H.M. : Vous êtes un nostalgique de l’ancien système ?

F. C-G. : Ah non pas du tout. Je ne regrette pas le passé, ce serait absurde. Je ne regrette pas la gauche et la droite, je regrette une époque où les gens comprenaient ce qui se passait. Certains sont tentés de revenir à notre jeunesse mais on ne reviendra pas en arrière. En revanche, il faut qu’on puisse donner aux gens des repères. On a un travail politique qui consiste à les aider à comprendre le monde qui les entoure.

Le J.H.M : Votre ouvrage va-t-il donner certains de ces repères ?

F. C-G. : Plutôt la méthode. J’explique dans mon livre en quoi les institutions ne servent pas qu’à produire des textes de loi et comment justement elles peuvent aider les gens à comprendre ce qui se passe.

Le J.H.M : Tout en conservant les institutions de la Ve République ?

F. C-G. : Ce que je propose, mais je laisse encore un suspense par rapport à cela, est un changement très fort mais ce n’est ni la IVe République ni la VIe République. En fait, on garde le fonctionnement de la Ve République mais on ajoute quelque chose…

Le J.H.M : plus de pouvoirs au Parlement ?

F. C-G. : C’est un peu plus que ça. C’est à la fois une innovation assez forte tout en gardant la solidité de la Ve République, avec un patron pour le pays.

Le J.H.M. : Quel est le titre de ce nouvel ouvrage ?

F.C-G. : Il y a un titre et un sous-titre. Le titre c’est »Savoir pour pouvoir« . En gros j’explique qu’aujourd’hui on ne sait pas donc on ne peut pas, il y a une vraie forme d’impuissance publique. Aujourd’hui, on prend des décisions à l’aveuglette. La question est donc de savoir comment on organise une connaissance des choses pour être effectifs et avoir prise sur la réalité. Le savoir en politique n’est pas le savoir scientifique. Le savoir politique c’est savoir les risques, c’est savoir apprécier les marges de manœuvre. Le sous-titre est : »sortir de l’impuissance démocratique« . On voit bien que oui on vote mais que la machine démocratique est devenue folle et tourne à vide. La démocratie est évidemment le meilleur des systèmes mais elle doit se réinterroger de temps à autre parce qu’aujourd’hui nos concitoyens ne se sentent plus représentés.

Le J.H.M. : Et vous apportez les solutions dans votre livre ?

F. C-G. : Oui, j’en propose une. Il y a cinq ans je posais le diagnostic.

Le J.H.M : Alors quelle est cette proposition ?

F. C-G. : Je ne vais pas la dévoiler maintenant. Ce que je peux vous dire simplement c’est que je propose une réforme des institutions. Je ne pense néanmoins pas encore une fois que c’est la fin de la Vè République mais une Vè République bis.


Quoi de neuf chez les Républicains ?

Le J.H.M. : Le parti auquel vous appartenez peine à sortir du marasme dans lequel il s’est trouvé ou mis en 2017, partagez-vous ce constat ?

F. C-G. : Vous le voyez bien. Les choses ne sont pas simples. Il y a la recherche d’un leader qui puisse rassembler. Mais on n’en est pas là pour le moment. Il y a des gens tout à fait honorables comme Xavier Bertrand, Valérie Pécresse, certains imaginent un retour de Nicolas Sarkozy, d’autres proposent Bruno Retailleau, certains pensent à Gérard Larcher. On a à la fois un certain nombre de personnes de qualité mais aucun n’émerge véritablement aujourd’hui. Ce n’est pas insurmontable. Ce qui me préoccupe, c’est que nous n’avons pas encore de ligne très claire. Certains voudraient revenir au clivage gauche droite et estiment qu’on devrait être plus à droite. C’est une vision passéiste des choses. Quand vous interrogez les jeunes aujourd’hui, la gauche et la droite ça ne leur dit pas grand-chose. On doit fixer une nouvelle ligne qui ne doit pas être un retour vers le passé. Au-delà de la crise des hommes, on a vraiment un positionnement de fond à avoir. Comme gaulliste, je pense que nous devons occuper un espace central. L’espace politique que Macron veut occuper est l’espace de tout gouvernement. Ce n’est pas ce positionnement que je critique. Je crois que l’on doit montrer qu’il y a un énorme écart entre ce qu’il dit et ce qu’il fait, qu’il est beaucoup dans la communication et pas dans l’action. Moi je critiquerais Emmanuel Macron non pas sur son positionnement mais sur les réalisations. C’est l’axe politique que je défends mais il y a un débat là dessus. Après oui nous sommes en difficulté mais quand on regarde les autres, c’est pareil. La crise est très forte. Regardez le PS, regardez le parti du Président. Ça fait bientôt quatre ans que cette majorité est en place, quatre ans que les institutions les soutiennent mais ils n’ont pas créé de parti politique qui reste très virtuel. « 

Le J.H.M. : Le temps presse, les élections présidentielle et législatives sont en 2022….

F. C-G. : Il y a un travail de fond qui est fait autour de Christian Jacob. Tant qu’il n’y a pas une ligne très claire ni de leader, ce travail de fond n’est pas très audible. Mais, le jour où on sera en ordre de marche, tout ce travail aura été utile.

Le J.H.M : Il n’y aura pas de primaire chez les Républicains ?

F. C-G. : il y a un débat là dessus, j’avoue je n’ai pas d’opinion très tranchée.

A lire dans notre édition de ce lundi 21 décembre

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