Visionnaire – L’édito de Christophe Bonnefoy
Peu nombreux sont ces Français dont le nom n’est plus un simple patronyme, mais est devenu un symbole. Une marque, même. C’est vrai en matière de gastronomie. Encore plus dans le domaine de la haute couture.
Pierre Cardin était de ces orfèvres qui ont su créer. Imprimer leur marque, justement. Connu, reconnu, célèbre à travers le monde. Comme toutes ces icônes de la mode : Dior, Chanel, Gaultier, Saint Laurent…
Mais Cardin, disparu hier à l’âge de 98 ans, n’était pas seulement l’un des fers de lance des grands défilés parisiens. Il n’hésita ainsi pas à tisser le lien entre l’univers du luxe et le grand public. Dès les années 50, il avait créé une ligne de prêt-à-porter. Déjà, il avait compris tout l’intérêt de se diversifier. Car il ne fut pas uniquement ce créateur qui aimait habiller les corps. Féminins ou masculins. Il se révéla surtout un véritable précurseur. C’est ce qui avait fait sa richesse. Au sens propre, comme au sens figuré. De simple artiste, il avait acquis le statut envié d’entrepreneur à succès. D’industriel, presque. Jusqu’à l’excès, peut-être, par le biais des licences. Jusqu’à inscrire son nom, sur un peu tout et n’importe quoi. Des bouteilles d’eau minérale, par exemple. Quelle idée… Ou si, justement : tout l’art de transformer, ici, l’eau en or…
Reste que Cardin, et c’est bien là l’essentiel, demeurera l’un de ceux qui auront le plus innové dans le monde de la mode. Les robes bulles, c’était lui. Les costumes à col Mao, toujours lui. Et en ces temps compliqués pour la culture, n’oublions pas qu’il passa une partie de sa vie à jouer les mécènes. Riche de ses talents d’homme d’affaires, certainement. D’avoir redistribué, d’une certaine façon, ce qui lui avait été donné, également.