De là-haut – L’édito de Christophe Bonnefoy
Pouvoir regarder notre bonne vieille Terre de là-haut est un luxe. Et l’assurance, quelque part, de pouvoir respirer, un peu. De prendre du recul, au sens propre, comme au sens figuré. Une vision idyllique à des milliers de kilomètres, face aux tristes réalités, parfois, lorsqu’on en foule le sol.
Le Français Thomas Pesquet pourrait sans doute le raconter très simplement : on n’oublie pas tout, à tutoyer les étoiles, mais on relativise. Et on se dit qu’il faut toujours croire en ses rêves.
Il y a pourtant un monde entre celui que l’on voudrait construire et celui que l’on voit se détruire.
A l’heure, quasiment, où CrewDragon et ses occupants prenaient les airs, vendredi, une fonctionnaire de police était assassinée à Rambouillet. Au moment où les aventuriers du ciel rejoignaient la station spatiale internationale, hier, un fichu virus continuait à nous pourrir la vie. Aucun rapport ? Peut-être pas, sinon la concordance des temps. En tout cas l’envie de se laisser porter par des images qui emmènent ailleurs. Et le besoin, de toute façon, d’attraper l’espoir où on peut encore le trouver. Comme une sorte de parenthèse.
Il y a quelque chose d’apaisant, de rassurant même, à regarder ces héros des temps modernes – à la fois scientifiques et sportifs de haut niveau – évoluer, là-bas, loin de nos turpitudes. Ils ne sont certes pas en séjour touristique et passeront leur temps à éprouver leurs organismes, à réaliser toutes sortes d’expériences improbables. Mais eux, au moins, arrivent encore à nous vendre du rêve. Du rêve – nécessaire – à plusieurs dizaines de milliards de dollars, certes. Mais tout de même.