Un modèle vacillant – L’édito de Patrice Chabanet
La chancelière Merkel a eu du mal à trouver les mots pour décrire le spectacle désolant provoqué par les inondations dans son pays. La belle mécanique allemande subitement enrayée par plus fort qu’elle. Du jamais vu depuis la guerre, une référence souvent évoquée par les sinistrés. Le pays s’en remettra. L’Allemagne a les ressources économiques pour faire face. Elle a les compétences techniques pour réparer ce que la nature a détruit. Son esprit de groupe qui la caractérise fera le reste. Les Allemands sauront se mobiliser sans état d’âme.
Première puissance européenne, l’Allemagne est bien décidée maintenant à prendre le taureau par les cornes. Le temps de la tergiversation est terminé. Pour une fois, tous les experts admettent que ce qui s’est passé la semaine dernière se renouvellera avec une fréquence accrue. Les prévisions du GIEC que certains jugeaient fantaisistes ou exagérées sont dépassées.
De toute façon, ceux qui nous gouvernent n’ont plus le choix, car l’impact devient politique. On pense bien sûr au renforcement des partis écolos dans l’opinion publique. Mais les partis traditionnels sont contraints de faire évoluer leurs discours, s’ils ne veulent pas être marginalisés. Le monde économique doit lui aussi prendre en compte la nouvelle donne climatique. De nombreuses entreprises se sont d’ailleurs emparées de l’argument environnemental pour se positionner sur leur marché.
Il n’est pas question de brandir le slogan de la décroissance pour endiguer les catastrophes qui se multiplient. Les pays nantis peuvent se le permettre. Pas les autres. Le défi qui nous est lancé est tout autre : comment renverser la tendance lourde du dérèglement climatique en un minimum de temps ? On ne change pas le cours d’un énorme vaisseau par un claquement de doigts. C’est avant qu’il fallait y penser.