Donnant-donnant – L’édito de Patrice Chabanet
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Le Tribunal constitutionnel de la Pologne – l’équivalent de notre Conseil constitutionnel – n’y est pas allé avec le dos de la cuiller. Il s’est prononcé contre la primauté du droit européen sur le droit polonais. Choc assuré au sein de l’Union. Seuls les partis d’extrême droite et d’extrême gauche ont applaudi. Souverainistes de tous les pays, unissez-vous…
Réponse du berger à la bergère : l’Union européenne a annoncé illico presto qu’elle utiliserait « tous les outils » . Pour le dire autrement, elle est prête à lui couper les vivres, notamment l’octroi des 36 milliards au titre du « méga plan de relance ». Une menace qui rétablit l’équilibre du donnant-donnant : engagement financier d’un côté, respect des règles communautaires de l’autre. On peut s’étonner que la juridiction suprême polonaise découvre maintenant ce qu’elle considère comme une incompatibilité entre droit européen et droit national. Pendant toutes les négociations – plusieurs années – elle n’avait rien vu ?
N’accablons pas les Polonais pour autant : ils sont une large majorité à se prononcer en faveur de l’Europe. Ils sont très nombreux à prendre la mesure des apports de l’Union. Qui a eu la chance de connaître la Pologne avant et après la chute du communisme peut témoigner des progrès inouïs de son agriculture et de son industrie. Il y a donc peu de chances que Varsovie prenne le risque de quitter le navire européen, même si des effets de manche peuvent attirer des sympathies en Hongrie, en Roumanie, en Slovaquie etc. Quitter l’Europe pour rejoindre le camp de la Russie ? Ce serait ignorer l’Histoire et l’emprise de l’Union soviétique, pendant des décennies. sur ces pays, avec ses conséquences invariables : suppression des libertés et fiasco économique. Conscient des dégâts provoqués par le Tribunal constitutionnel, le Premier ministre polonais a déjà mis un peu d’eau dans sa vodka. Dès hier il a réaffirmé son attachement à l’Union européenne. Cette dernière a bien fait de montrer les dents.