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Le mystère du portrait de Jeanne Mance

Ce célèbre portrait de Jeanne Mance n’est, in fine, probablement pas authentique.

L’un des rares portraits connus de la Langroise Jeanne Mance, cofondatrice de la ville de Montréal, est nimbé de mystère. Signé Louis Ernest Dugardin, il pourrait, en réalité, plutôt représenter une simple Parisienne du XIXe siècle.

Le tableau (voir photo) est l’une des très rares peintures connues représentant Jeanne Mance, la célèbre Langroise cofondatrice de la Ville de Montréal. Ou du moins, censée la représenter. Car un mystère l’ehttps://fr.wikipedia.org/wiki/Jeanne_Mancentoure depuis son acquisition par l’Hôtel-Dieu de Montréal (créé par Jeanne Mance) durant les années 1870. Comme le relève l’historien Gabriel Martin, de l’université de Sherbrooke (Québec), dans un article publié en 2018 dans la revue Québec Histoire, la toile souffre d’emblée de doutes quant à son authenticité. La signature figurant au dos, « L. Dugardin », conduisit à attribuer le tableau à Louise Dugardin, une portraitiste réputée du XIXe siècle.

Mais, au fil des décennies, de nombreux doutes apparaissent au sein des historiens d’art. « Les investigations tentées autour de ce portrait, soit au Canada, soit en France, sont demeurées vaines jusqu’ici », écrivit, dans les années 1950, l’historienne Marie-Claire Daveluy. En 1980, son homologue Denis Martin aboutit aux mêmes conclusions : « Aucun indice n’établit clairement l’origine du portrait ». Autrement dit, ce “Jeanne Mance”, en admettant qu’il ne soit pas un faux, est clairement sujet à caution.

Un modèle photographique ?

Gabriel Martin a finalement trouvé, en 2018, la clef de l’énigme. Selon lui, l’œuvre a, en réalité, été réalisée par Louis-Ernest Dugardin, un peintre parisien demeuré peu connu à son époque, et qui n’est jamais passé à la postérité. Pour établir cette paternité, l’historien a identifié un petit sceau au dos de la toile qui mentionne l’adresse du 9, rue de Rochechouart, dans le IXe arrondissement de Paris. Après quelques recherches administratives, Gabriel Martin a découvert que cet immeuble abritait, dans la seconde moitié du XIXe siècle, une entreprise baptisée Société des reproductions artistiques, créée par Louis-Ernest Dugardin. Le peintre est donc enfin retrouvé.

L’ennui est que ce Dugardin était bien davantage un peintre de gros et un homme d’affaires qu’un véritable artiste. Sa technique privilégiée, comme l’a découvert Gabriel Martin, est de peindre par-dessus une photographie ainsi colorisée. Dès lors, il y a fort à parier qu’il a agi de même pour le prétendu “Jeanne Mance”. « Je serais curieux de voir le résultat d’une analyse aux rayons X réalisée sur cette huile… », a ainsi confié l’historien au journal québécois Le Devoir, qui l’interrogeait sur ses découvertes. Cette “Jeanne Mance” ne serait, dès lors, qu’une Parisienne du XIXe siècle ayant accepté de servir de modèle photographique…

Nicolas Corté

n.corte@jhm.fr

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