Exaspérés par le bruit et les poussières des Fonderies de Saint-Dizier
Un groupe de riverains n’en peut plus des poussières provenant des Fonderies de Saint-Dizier, situées à quelques mètres de leurs maisons. Ils ont interpellé la Dreal et la municipalité.
Tous les jours, Marie-France Talbot balaie sa terrasse, à l’arrière de la rue Chambre. « Vous voyez ce que je récupère », dit-elle en montrant un petit tas gris noir, mélange de terre, de sable, de minerai noir, de fines brindilles. Certes, le vent ramène toujours un peu de poussière sur les salons de jardin et les terrasses, mais là cela représente une belle quantité pour une seule journée. Depuis que ça dure, elle en a rempli des verres. Non sans inquiétude, « C’est pas de nettoyer le pire, c’est que nous respirons donc ce que je récupère. Ce n’est pas bon pour notre santé ».
Le phénomène perdure depuis quelques années, une pétition, qui avait recueilli 86 signatures, avait même été lancée par un voisin pour se plaindre des poussières, des vibrations et du bruit la nuit. Comme rien ne s’améliorait, la riveraine interpelle Franck Raimbault, l’adjoint à l’environnement. « Il m’a conseillé de me rapprocher de la Dreal », raconte-t-elle. « Bref, c’est comme si on avait rencontré la mairie pour rien », tance son mari. Un signalement est donc effectué à la Dreal et un agent fait « une visite d’inspection inopinée le 29 septembre.
Des dépassements constatés
Sur place, il constate que »l’ordinateur sur lequel les données (des relevés de poussière) sont envoyées était en panne depuis trois mois. (…) L’exploitant n’a pas été en mesure de récupérer une quelconque donnée« . Le suivi des émissions a repris rapidement après cette visite, démontrant »un respect des valeurs limites si l’on considère une moyenne journalière, mais de nombreux dépassements ponctuels et un dépassement des valeurs limites lors de quelques séquences supérieures à 30 minutes« . Un rapport a été envoyé au préfet, »proposant un arrêté de mise en demeure« . Contactée, la préfecture a indiqué que la procédure suivait son cours. Un procès-verbal de contravention a aussi été adressé au procureur de la République.
L’agent de la Dreal a également décrit »une cour des expéditions sale, où les fines sont entreposées en tas et sont sujettes aux intempéries« . L’entreprise aurait déclaré, factures à l’appui, »expérimenter plusieurs solutions visant à stopper la pratique actuelle qui consiste à faire des tas de fine, puis de les transvaser dans des bennes, sans grand succès« .
Réduire au maximum
Face à ces critiques, le directeur des ressources humaines des Fonderies relativise la situation. »Concernant l’état de la cour, nous avons fait venir une entreprise d’entretien des routes pour la nettoyer« , explique le responsable. Quant aux fines qui s’envolent, ce dernier reconnaît le problème : »Nous avons intégré une filière de valorisation des déchets. Nous évacuons les fines pour les intégrer à du ciment. Quand il y a du fort vent, les fines s’envolent. Nous sommes conscients que cela génère une nuisance, mais nous travaillons de concert pour la réduire« . Hier après-midi, le sol de la cour était encore noir et le hangar grand ouvert. »Mais pourquoi ils ne le ferment pas ? On va sur la Lune mais on ne sait pas fermer une usine ?« , déplore un riverain et ancien fondeur.
Marie-Hélène Degaugue
mh.degaugue@jhm.fr
Déménager ou fermer
Le groupe de riverains a prévu de rencontrer le maire, la semaine prochaine. Exaspérés par la situation, ils ont des solutions à lui proposer. »On voudrait un capteur installé devant l’usine, qui calculerait la qualité de l’air et le niveau du bruit, 24h/24h pendant quelques mois. Comme ça, on saura pour la santé publique« , affirme Marie-France Talbot. Par ailleurs, ils souhaiteraient que les Fonderies ferment leur local, empêchant toute fuite des fines et permettant une atténuation des bruits.
Les riverains vont aussi proposer le déménagement des Fonderies à l’ancienne usine Yto, à la sortie de la Ville : »Il y a de grands locaux fermés, les camions pourront passer sans gêner, autant regrouper les usines« .
Interrogés sur le fait d’avoir acheté une maison près d’une usine, les riverains s’insurgent : »C’est ce qu’on nous répond. Mais dans les années 80, il y avait moins de nuisances. Et en 2021, il existe des systèmes d’aspiration, de filtration. Nous ne voulons pas la fermeture des Fonderies mais on peut améliorer son fonctionnement« .