Michel Gentils : le globe trotter de la « douze cordes »
Le guitariste français est un des maîtres de la douze cordes. Petit voyage dans l’univers authentique de Michel Gentils.
Michel Gentils, douze cordistes par excellence dans l’Hexagone, vit à Mengon, dans le Diois, au cœur de la Drôme lorsqu’il n’est pas sur la route, flanqué de ses guitares. Sa carrière, il la doit à certaines circonstances de la vie, des rencontres au gré des voyages. Et à une passion sans limites qu’il voue à la musique. Sa musique, métissée de parfums ensoleillés. Loin des clichés du «showbiz» et du chant des sirènes commerciales.
Un parcours mondialiste
À 18 ans, Michel Gentils part aux États-Unis à La Nouvelle-Orléans, rencontre un ami de Léo Kottke, maître incontesté de la guitare 12 cordes, qui lui donne les premières clés d’accès à cet instrument.
A Nashville, c’est Norman Blake, l’as américain du «flat picking», qui lui ouvre les portes de la musique country. Plus tard, à San Francisco, il découvre la musique «West Coast», côtoie le groupe Jefferson Airplane et devient professionnel en se produisant avec ses compositions dans les cabarets où Bob Dylan, Jimmy Hendrix et autre Janis Joplin ont démarré dix à quinze ans plus tôt. Rude école, où seuls les musiciens authentiques sont tolérés !
Il enregistre en 1978 un premier disque de guitare «picking», devient l’un des introducteurs de cette technique en France et, le chantre de la guitare à douze cordes comme instrument de soliste : télévisions, radios, concerts et stages. Tout jeune, il est ainsi appelé à jouer en solo sur de très grandes scènes comme au festival de Nyon (Suisse).
Puis, seconde forte influence, il part en Inde où il donne des concerts, mais découvre surtout la musique d’un autre monde. À Bénarès, il apprend la fameuse technique de fabrication des chevalets des instruments à cordes indiens, qu’il adapte lui-même à la guitare, créant ainsi la « guitare-vina ».
Promouvoir l’instrument
Marcel Dadi le pousse en 1992 à sortir un disque de ses compositions sur guitare à douze cordes. Il dira de lui : «J’enrage de n’être que le premier à vous parler d’un musicien d’une telle stature» : ce sera «Trajectoires». Les tournées en Europe se succèdent : Belgique, Royaume-Uni, Italie, Hongrie, Suisse, Allemagne… En 1998, il accompagne la chanteuse Desireless. L’année suivante, nouveau CD de compositions en solo : Live à l’ouest de la Grosne». En 2006, il sort un DVD : «Michel Gentils en concert», enregistré au Moulin du Roc, scène nationale de Niort.
Pour promouvoir la guitare douze cordes, Michel Gentils organise depuis quelques années, des stages chez lui, ou dans d’autres lieux en France, propices à la pédagogie. Le prochain aura lieu près de Saint-Etienne du 11 au 14 novembre. Contact : 06.11.02.49.30, ou gentils.michel@wanadoo.fr
Trois questions à …
Michel Gentils : « l’instrument est marginalisé »
Votre musique est métissée. Qu’est-ce qui prédomine ?
Je suis très influençable: toutes les musiques que j’ai aimées ont marqué la mienne. Mes voyages ont été déterminants. L’Irlande en 1970, les Etats-Unis en 1975, où j’ai débuté ma carrière dans l’influence de leurs musiques traditionnelles, et de la musique West Coast.
L’Inde ensuite en 1984. Rentré en France, j’ai été durant vingt années un élève d’Ali Dédé Altintas, un grand maître turc de l’improvisation. Il y a eu aussi la musique contemporaine et classique avec mes amis hongrois de l’Ensemble « Petite Europe » et puis beaucoup de rencontres avec des musiciens de cultures les plus diverses (flamenco, Tibet, Mongolie…). Il y a longtemps que les artistes savent faire de la mondialisation en échangeant et partageant leurs talents équitablement: sur ce plan, les marchands sont très en retard, et pourraient prendre modèle sur eux.
En quoi la guitare 12 cordes est différente de la 6 ?
Sur les six cordes supplémentaires de la guitare à12 cordes, quatre n’existent pas sur la six cordes.
Pour cette raison, la 12 ne se joue pas comme la 6 ! Pourtant, l’écrasante majorité des guitaristes s’évertuent encore à la jouer exactement comme leur 6 cordes. Lorsque la 12 est jouée… comme une 12, elle prend toute sa dimension, et, en outre, devient physiquement abordable. Curieusement, les techniques spécifiques de 12 cordes sont quasiment inconnues, et l’instrument est marginalisé. C’est pourquoi, après avoir écrit la première méthode de guitare à 12 cordes, je suis, avec tout un groupe de passionnés, sur le point de fonder une Association des joueurs de 12 cordes. Si vous êtes tentés, prenez contact avec moi.
[imagebrowser id=14] Quelle est ta guitare de cœur, ou de prédilection ?
La guitare que m’a fabriquée J.P. Favino en 1985 est mon instrument fétiche, un véritable chef d’œuvre.
Pour autant, chaque luthier donne une âme à ses instruments. Si cela est fait avec cœur, chaque guitare a sa personnalité, et toutes les personnalités sont belles. J’ai envie de les jouer toutes.
J’ai adoré celles de Maurice Dupont, d’Alain Queguiner, de Thomas Fejoz…